Le Palais de Justice

Avec Jean Jacques Régis de Cambacérès, montpelliérain et père du Code Civil (il lui a consacré 10 ans de sa vie) c’est peu dire que le droit et Montpellier sont intimement liés ! Cette visite nous propose une vision globale du droit à Montpellier entre redécouverte des origines théoriques et pratiques, visite des lieux d’enseignement et d’exercice de la justice. L’enseignement du droit est une discipline ancienne à Montpellier qui a eu un grand impact sur la ville. Elle va être enseignée par des Maîtres à partir du XIIeme siècle dans le quartier de Sainte-Eulalie alors qu’auparavant, c’est la justice seigneuriale qui y était rendue.
Le palais de justice, construit en 1846 avenue Foch, est inscrit aux monuments historiques. De style néo-classique, d’une architecture majestueuse, sa façade particulièrement imposante par ses dimensions et ses fresques, d’un style corinthien est une allégorie de la justice. Séparé de la rue par un immense escalier, deux gardiens encadrent la majestueuse porte du palais : la statue de Cambacérès, illustre magistrat montpelliérain et celle du cardinal de Fleury, ministre de Louis XV. Il représente le siège du pouvoir. Il abrite actuellement la cour d’assises et la cour d’appel. Les autres administrations judiciaires ayant été transférées dans le nouveau Palais de Justice (Cité Judiciaire).
L’ancienne maison d’arrêt qu’on appelait le château, fermée en 1990, est adossée et reliée au palais de justice. On y accédait par « le pont des soupirs ».
Visite des différentes salles d’audiences du palais de justice à l’architecture majestueuse. Impressionnantes salles pour qui y pénètre pour la première fois. Belle allégorie de la justice avec des tableaux historiques datant de 1629.
N’oublions pas la « salle des pas perdus » qui historiquement signifie la salle de ceux qui n’ont pas perdu…aux élections!
Passage par le Rectorat rue de l’université qui devint en 1890 le Palais des Universités. Les Facultés sont logées dans ce bâtiment jusqu’en 1939 pour les lettres, 1956 pour le droit et 1966 pour les sciences.
De beaux panneaux en bois peints peuvent y être admirés célébrant pour l’un la création, par une bulle du Pape de l’Université de Montpellier en 1290, le deuxième la célébration des 600 ans de cette création et un troisième panneau célèbre les personnages illustres de tous les savoirs.
Aujourd’hui, ce bâtiment est le siège du Rectorat.
Une incursion passionnante au cœur de la justice.                                                   Patricia SELVA

 

Qui l’eût cru ? Un 3 janvier, 60 inscriptions et 10 personnes sur liste d’attente pour visiter le Palais de Justice de Montpellier, rue Foch! Le Palais de Justice abrite la Cour d’assises et la Cour d’appel. Les autres administrations judiciaires ont été transférées dans le nouveau Palais de Justice (cité judiciaire). Bilan de ces deux heures de visite : une foule d’information donnée par notre excellente guide, madame LECOT, spécialiste de l’histoire de Montpellier, une remontée dans le temps …et une révision de l’histoire de France pour la plupart d’entre nous ! Nos disques durs cérébraux étant parfois défaillants, un petit compte rendu s’impose ….

1ère étape : Arrêt devant le Palais de Justice pour un cours sur l’architecture

L’architecture de la plupart des Palais de Justice s’inspire des temples romains (Thémis déesse de la Justice) et ont été construits fin 18ème début 19ème s. En effet, avant la révolution, pas de système judiciaire national.  Dans les provinces, la justice était rendue par les seigneurs.  L’apparence des Palais de justice répondait à des enjeux idéologiques : le peuple doit craindre la justice. L’objectif était de produire une impression de majesté et de solennité propre à inspirer le respect aux citoyens. D’où l’aspect imposant de ces bâtiments voulu par les architectes tels qu’Etienne Louis Boullée et Claude Nicolas Ledoux. Boullée et Ledoux ont inventé le concept d’une architecture exprimant sa fonction, doctrine qu’ils appelèrent architecture parlante.(Les adhérents qui ont visité Arc et Senans  avec Culture et Convivialité en ont eu de nombreux exemples avec les maquettes de Nicolas LedouxLes symboles de la Justice : le glaive et la balance, le miroir de la vérité sur lequel s’enroule le serpent du mensonge, les Tables de la Loi.La loi et le droit sont gravés sur les murs, peints sur les plafonds ou tissés sur les tapis.
Rappel de la différence entre un temple romain et un temple grec :
– Temple romain : sur podium.
– Temple grec : au ras du sol.
Le Palais de justice de Montpellier est réalisé de 1846 à 1853 par Charles Abric  qui a aussi réalisé le conservatoire anatomique de la faculté de médecine. Deux statues veillent sur le Palais de Justice :
– Le Cardinal Fleury : André Hercule de Fleury, né à Lodève, est un ecclésiastique et homme d’État français, qui, de 1726 à 1743, a été  le principal ministre (sans en avoir le titre officiel) du jeune roi Louis XV.
– Jean-Jacques Régis de Cambacères (1753- 1824), né à Montpellier. Jurisconsulte, il a traversé tous les régimes ! Spécialiste des questions juridiques, il a consacré 10 ans de sa vie à l’écriture du Code Civil qui a été adopté en 1804. Compte tenu de ses nombreuses attributions, on se demande comment il a fait !Un échantillon : Député de l’Hérault, Duc de Parme, Ministre de la Justice, Archichancelier de l’Empire, 2ème Consul, Membre de l’Académie Française, Grand Maître du Grand Orient ….et bien d’autres !

2ème étape Visite de l’intérieur

La salle des pas perdus (l’origine de cette dénomination est très controversée). Cette salle existe dans tous les palais de justice. Même décor qu’à l’extérieur, mais peint en trompe- l’œil. Quatre personnages à chaque angle du plafond :
-Justinien 1er (6ème s. après JC) : Empereur byzantin qui a fait établir les bases du droit (corpus d’environ 500 documents) à partir d’anciennes lois romaines. Le code justinien, redécouvert en Europe occidentale au cours du XIIe siècle, devient la source de l’enseignement du droit romain qui pour une bonne part devient le droit civil de beaucoup de pays européens. 
-Charlemagne : L’empereur voulait un système juridique unifié et a tenté de légiférer dans tous les domaines. Il envoie des missi dominici dans tout le royaume pour imposer son code, hélas sans succès.
-Saint-Louis : Pour les français, St Louis symbolise l’idée de justice (souvenez-vous de nos manuels scolaires…et du chêne !) Saint-Louis décrète que la justice ne peut être rendue que par des juges et qu’elle est la même pour tous. Il voulait que la justice dans son royaume soit au-dessus d’intérêts particuliers, y compris au-dessus des grands du royaume.  Il a réorganisé les procédures judiciaires pour les rendre plus justes quelle que soit la condition du justiciable.
-Napoléon 1er : un grand réformateur ! La loi du 18 mars 1800 réorganise les institutions judiciaires. Cette loi entend rationnaliser l’organisation des tribunaux et mettre fin au désordre engendré par la Révolution (juridictions mal définies, élection des juges, …). En 1804, un Code civil, ou Code Napoléon, fut rédigé, suivi d’une série d’autres codes : Code de Procédure civile, Code de commerce, Code d’instruction criminelle, Code pénal.

La salle des Assises
Elle est moins imposante qu’on ne s’y attendait ! Pas très grande, en fait. Les boiseries (en chêne) semblent bien ternes. Notre guide attire notre attention sur les deux grands tableaux datant du 19ème.
– Un tableau historique (peint par Ernest Michel) qui représente la réunion en 1629 des Comptes, des Aides et des Finances. Richelieu y apparait en bonne place. Sur le tableau, des hommes en robe longue rouge : couleur des élites et des médecins (Noblesse de robe).
-Un tableau allégorique (voir photo).Le tribunal a été bâti sur l’emplacement du château des Guilhem. De tout temps, la justice a donc été rendue au même endroit.
La Cours d’Appel (Chambre correctionnelle) Le tableau au plafond (peint par Jean de Troy) représente Louis XIV écrasant l’hérésie huguenote, évocation de la révocation de l’Edit de Nantes en 1685.
La Chambre civile
Décor plus raffiné : des mosaïques au sol, du marbre de Caunes Minervois. Très belle frise entourant une toile au plafond de Joseph Marie Vien, maître de Jacques Louis David, toile qui représenterait les 7 provinces du Languedoc (Interrogation de notre guide qui n’a pas encore réussi à identifier les 7 provinces).

3ème étape le Rectorat

Après une agréable petite marche, nous pénétrons au 31 rue de l’Université. Un magnifique tilleul de 200 ans trône au milieu de la cour dénommée …Cour Soulages (!). Celui-ci a offert un de ses tableaux au Recteur…d’où cet hommage …mais le tableau n’est pas visible par le public.Les deux autres cours portent les noms de Marie de Montpellier et Rabelais. Dans une salle de conférence, deux immenses tableaux se font face : – Un tableau représente la cérémonie de la création de l’université de Montpellier en 1289, en présence du Pape Nicolas IV et de l’évêque de Maguelone. Nous avons l’honneur d’écouter notre guide nous faire la lecture de la Bulle pontificale,très instructif !  
– Le deuxième tableau représente la fête donnée en 1890 à l’occasion des 600 ans d’existence de l’université de Montpellier, y figurent le Président Sadi Carnot et le Président des étudiants portant la « faluche » (coiffe traditionnelle des étudiants de France).
Dernier arrêt, dans un couloir, devant une peinture murale réalisée par Ernest Michel.Elle met à l’honneur les cinq disciplines enseignées à Montpellier, représentées par de nombreux personnages historiques que l’on s’est amusé à essayer de reconnaître.

Dernière info : les « occupants » successifs   du bâtiment
Ecole Mage : Ecole supérieure des Lettres   de 1461 à 1590                                     Hôpital St Eloi de 1590 à 1890                                                                                    Palais des Universités de 1890 à 1965 : 500 étudiants en 1850 – 20 000 en 1965 Rectorat. Cette petite virée dans le passé fût, comme d’habitude, pleine d’enseignement…

L’histoire du droit
Elle est très ancienne …et Montpellier est la première ville à l’enseigner ! Le plus ancien code connu date de 1750 avant JC : le code de Hammurabi, roi de Babylone.  Il est gravé en écriture cunéiforme et en langue akkadienne sur une stèle en pierre de basalte noire (2 ,25 m de haut et 70 cm de large) que l’on peut admirer au Louvre. Cette stèle a été mise au jour  en 1901 à Suse en Iran, par des archéologues français.  Vient ensuite le Droit romain qui a défini le statut de citoyen romain, avec ses droits et ses devoirs.                                                                                                             L’expérience juridique romaine couvre plus d’un millénaire depuis la loi des Douze Tables autour de 450 av. JC, jusqu’au Corpus iuris civilis de l’empereur Justinien vers 530. Après une longue période d’oubli, au 12ème, des érudits italiens redécouvrent le corpus romain, l’analysent, l’annotent appliquant à la fois des méthodes d’analyse interlinéaire et d’explication des mots (« les gloses »). Parmi ces glossateurs, le sieur Placentin traverse les Alpes pour diffuser son savoir. Il arrive à Montpellier où règnent les Guilhem, érudits et déjà entourés de conseillers juridiques.  Il fonda la première école de droit romain  vers 1190. Une rue, proche du Palais de Justice, porte son nom.
1181 : Le seigneur de Montpellier Guilhem VIII accorde à tous (mais pas aux Juifs) le droit d’exercer et d’enseigner la médecine. C’est le fondement de la faculté de médecine de Montpellier qui sera officiellement créée en 1220.                                                         1249 : Fondation de l’Ecole du Droit et des Arts                                                                  1289 : le pape Nicolas IV adresse, depuis Rome, la constitution apostolique « Quia Sapientia », à tous les docteurs et étudiants de la ville de Montpellier, créant ainsi officiellement l’université de Montpellier, regroupant le droit, la médecine, les lettres et la théologie.
L’histoire du Droit à Montpellier est donc quasiment aussi ancienne que celle de la Médecine. On fêtera, en 2020, les 800 ans de la Faculté de Médecine !!               

Elisabeth Bonnafé

Crédits Photos: René POHL, Elisabeth BONNAFÉ, Daniel LUSSET
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Une réflexion sur « Le Palais de Justice »

  1. Merci pour cette visite qui fut très agréable et instructive .
    Il y a très longtemps que je n’étais pas passé par la rue de l’université et je ne me souvenais pas qu’elle était aussi pentue. C’est à ce genre de détail que l’on voit que Montpellier est un “mont”.
    Merci encore. Annette

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